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Trois ans de prison dont 18 mois de sursis pour le chauffard de Moorea

En juillet 2020 à Moorea un homme de 58 ans était percuté par une voiture alors qu’il se trouvait sur le bas-côté de la route. Transporté en urgence à l’hôpital de Afareaitu il décédait des suites de ses blessures. Accusé d’homicide involontaire avec circonstances aggravantes, le conducteur, en état d’ébriété au moment des faits, a été condamné à une peine de trois ans de prison dont 18 mois avec sursis.

Il est tôt ce matin à Moorea et comme tous les dimanches, Éric va chercher des firifiri au magasin. Sur le chemin du retour il rencontre deux amis avec lesquels il va partager ses firifiri et discuter. Il a le temps, il est célibataire et sans enfants, personne ne l’attend dans la petite cabane où il vît. Il se tient sur la piste cyclable et ses deux collègues sont assis sur un parapet, quand une voiture arrive et le percute l’éjectant à 27 mètres. La voiture poursuit son chemin et s’arrête à une centaine de mètres de l’accident. Un homme en sort et reste prostré sur place sans esquisser le moindre pas pour porter secours à la victime. Et pour cause, il est sous l’emprise de l’alcool et de stupéfiants. Les analyses indiqueront un taux de 1,84 gramme par litre de sang et aussi qu’il avait fumé du paka.

Des lésions mortelles au crâne et à l’abdomen

Un couple, dans une voiture qui le précédait, indiquera aux gendarmes que le conducteur avait un comportement erratique sur la route. Il collait leur véhicule, s’en éloignait et revenait sur eux en zigzaguant. Peu de temps après être arrivés au niveau d’Éric et de ses amis, ils entendent un bruit et dans le rétroviseur aperçoivent quelque chose voler dans les airs. C’était Éric qui succombera peu de temps après de ses blessures alors qu’il était transporté en urgence à l’hôpital de Afareaitu. Son autopsie révélera des lésions mortelles au crâne et à l’abdomen, des lésions caractéristiques d’un choc violent.

Le conducteur interpellé passera 10 mois en détention provisoire puis sous contrôle judicaire jusqu’à ce vendredi. Il vît désormais en métropole et était absent lors de l’audience. Ce qu’à déploré la sœur de la victime qui demande juste que « justice soit faite. » L’avocate du conducteur a tenu à préciser que l’absence de son client était due au coût du billet, « il a de nombreuses dettes et ce n’est pas son souhait de fuir la justice, d’ailleurs il m’a fait parvenir une lettre à l’intention de la famille de la victime. » Une lettre dont la sœur d’Éric refusera de prendre connaissance.

Pour l’avocat de la famille, « deux destins se sont rencontrés ce matin-là. » Après avoir évoqué la dizaine de canettes de bières retrouvée dans le véhicule dont une entamée sur l’accoudoir central de la voiture, « il buvait en conduisant », il fustige le chauffard de n’avoir eu « aucun geste pour se porter au secours d’Éric et de n’avoir eu aucun mot pour lui. ». Précisant que le code pénal prévoit « sept ans de prison pour homicide involontaire avec circonstances aggravantes », il réclame 1 500 000 Fcfp au titre du préjudice moral.

« Il ne s’est jamais dit qu’un jour je dois faire face à la famille et donner des explications. »

Pour la procureure, l’absence de l’accusé ne passe pas. « Je veux bien entendre les soucis financiers et une vie pas simple mais l’on sait que lorsque le prévenu doit faire face à la famille de la victime, c’est un moment attendu par elle pour pouvoir faire le deuil et entendre des regrets. (…) Il ne s’est jamais dit, un jour je dois faire face à la famille et donner des explications. Ce silence me paraît criant. Il a un devoir moral d’être présent aujourd’hui » Quant à la lettre adressée à la famille, « depuis 2020, ce n’est que maintenant qu’il envoie un courrier. »

Relevant que le prévenu avait huit condamnations sur son casier judiciaire dont la plupart pour conduite en état d’ébriété, elle déplore : « il a été condamné à des peines pédagogiques et cela a été un échec. » Elle poursuit, « on est en haut de l’échelle des homicides involontaires » et requiert « quatre années de prison dont un an de sursis probatoire avec obligation de soins et d’indemnisation pour la famille de la victime. »

« Pour tout le monde à Moorea il était le farani qui a tué un Ma’ohi. »

Pour la défense, le conducteur prénommé Logan est « une victime de guerre, il s’est engagé dans l’armée à l’âge de vingt ans, il en a 33 aujourd’hui, et a fait l’Afghanistan d’où il est revenu traumatisé. Il a vu de nombreux cadavres et il y a perdu son ami le plus proche. Il n’a pas été soigné et il est tombé dans l’alcool et les stupéfiants. » Alors en métropole, on lui vante « la vie à Tahiti et il vient ici pensant se refaire. Mais la vie au paradis n’est pas si facile, on y vit pas que d’amour et d’eau de coco. » De fait très tôt Logan se retrouve SDF « chez Père Christophe, puis il fait des petits boulots et est parti à Moorea et c’est là qu’il a replongé dans l’alcool. »

Elle explique qu’à sa sortie de détention provisoire « il a été rossé et c’est pour cela qu’on lui a conseillé de retourner en métropole, car pour tout le monde à Moorea il était le farani qui a tué un Ma’ohi. » Dès son retour en France, il a été pris en charge par les anciens combattants « et maintenant il travaille et a retrouvé une stabilité. Il ne boit plus et se déplace à vélo. » Pour autant elle estime que son client doit payer mais demande une peine mixte assurant « qu’il a démontré qu’il pouvait changer. »

Il a été condamné à trois années de prison dont 18 mois avec sursis avec obligation de soins, de travail et à 750 000 Fcfp au titre du préjudice moral.

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