Au lendemain d’un exercice de grande ampleur sur l’arrivée d’un tsunami au fenua, organisé par la direction de la protection civile, les autorités ont rappelé que le risque existe. D’ailleurs, les experts du centre polynésien de prévention des tsunamis ont cassé plusieurs idées reçues : ce n’est pas une vague et encore moins une vague surfable, le récif ne protège pas les îles et c’est la pente qui détermine l’amplification du phénomène.
Un exercice de sécurité civile relatif à la gestion de l’arrivée d’un tsunami a été organisé par la direction de la protection civile mardi. Un exercice qui s’inscrivait dans « une démarche globale d’acculturation au risque » et une volonté « de tester l’ensemble de la réponse opérationnelle ». Mais surtout il s’agit de préparer la population polynésienne et l’informer sur ces risques. Raison pour laquelle Stéphane Quéma, directeur du laboratoire de géophysique et Anthony Jamelot, géophysicien, se sont prêtés à un exercice pédagogique ce mercredi. D’abord en rappelant qu’un tsunami n’est pas « une grosse vague » ou « une déferlante » mais « une onde océanique de très grande période se propageant à très grande vitesse à travers les océans ». Un glissement de terrain, du volcanisme, un séisme peuvent générer des tsunamis. Depuis 1964, le centre polynésien de prévention des tsunamis (CPPT est un centre de détection autonome et spécialisé dans les tsunamis en Polynésie française depuis 60 ans) compte en moyenne 7 tsunamis par an dans le Pacifique dont un en Polynésie. « De par notre place au milieu de l’océan Pacifique, les risques proviennent de toute la ceinture de feu et des zones de subduction qui peuvent créer des séismes » qui peuvent créer à leur tour des tsunamis, explique Stéphane Quéma.
La pente détermine l’amplification du phénomène
« Cette onde océanique devient dangereuse et potentiellement destructrice lorsqu’elle atteint les côtes par un phénomène d’amplification suite à la diminution progressive de la profondeur à l’approche du littoral générant ainsi un raz-de-marée. » Et plus la pente est douce, plus l’amplification sera forte. Récif ou pas. D’ailleurs cette différence de pente entraine des différences de réponses selon les archipels. Selon Stéphane Quéma, « si la pente est raide comme aux Tuamotu, il n’y aura pas d’impact particulier du tsunami mais si derrière le récif il y a une pente très douce on aura un impact important sur les îles ».
Les Marquises sont particulièrement concernées d’ailleurs ce n’est pas ignoré des habitants dont la langue est la seule au fenua possédait un mot pour les tsunamis : taitoko. Un tsunami n’est pas un phénomène ponctuel, il peut produire de nombreuses élévations du niveau de la mer qui se succèdent pendant plusieurs heures et les hauteurs les plus importantes ne seront pas forcément celles de la première arrivée. En 2011, après le puissant séisme qui a touché le Japon, les enregistrements montrent une première arrivée en Polynésie puis une deuxième trois heures plus tard, encore une dix heures après et une nouvelle treize heures plus tard. Depuis l’année 1800, 50 tsunamis ont été observés dans nos îles dont deux qui ont particulièrement marqué : en 1946 où les hauteurs maximales de 15 mètres aux Marquises, 6 mètres à Rurutu et 8 mètres sur la côte Nord de Tahiti ont été relevées. Il fera d’ailleurs une victime. Et en 1960 avec une hauteur de 2,4 mètres à la Pointe Vénus.
Des alertes plus affinées
Aujourd’hui, après quelques alertes plus ou moins ratées, peut-être trop rapidement déclenchées ou des sirènes restées muettes, le Haut-commissariat, la direction de la protection civile et le CPPT assurent que des progrès ont été faits pour mieux affiner les alertes. « Nous sommes aujourd’hui capables de fixer les hauteurs attendues et les horaires d’arrivée. » Désormais des alertes sont d’abord déclenché au sein des services spécialisés et ce n’est qu’en cas de confirmation du risque que les sirènes sont déclenchés et les évacuations ordonnées. Mais les experts rappellent que « les tsunamis sont imprévisibles » et les alertes proviennent automatiquement du système de détection des séismes. Il faut donc rester « humble face à des phénomènes dont chaque événement est différent et dont on continue à apprendre ». Pour le Haut-commissariat, il est important « d’acculturer », la population à ces risques pour qu’elle sache pertinemment comment agir en cas d’alerte. Pour rappel, le signal d’alarme est un son modulé d’une minute, trois fois de suite avec une pause de cinq secondes entre chaque. La fin de l’alerte est un son continu de 30 secondes. Le colonel Éric Rigollet, directeur par intérim de la protection civile, rappelle les consignes de sécurité : s’éloigner des côtes, écouter les informations, ne pas prendre son véhicule, ne pas aller chercher ses enfants à l’école, éviter d’encombrer les lignes téléphoniques…