ACTUS LOCALESJUSTICE Un couple à couteaux tirés Pascal Bastianaggi 2020-04-21 21 Avr 2020 Pascal Bastianaggi Un couple était jugé pour des violences conjugales, ce mardi au tribunal. La femme a porté un coup de couteau à son mari lors d’une violente dispute. Les deux belligérants ont été condamnés à de la prison avec sursis. Audience particulière ce mardi où les prévenus, à la fois victimes et accusés, étaient absents. L’avocat qui devait représenter Eugène était lui aussi absent. Cela n’a pas empêché le tribunal de les juger. Eugène, 56 ans et Tania, 29 ans, sont ensemble depuis 10 ans. De leur couple sont issus deux enfants de 8 et 2 ans qui sont élevés par leur grand-mère. Lui travaille, et elle, est sans emploi. Si la violence s’est installée dans le couple, il y environ cinq ans, les faits qui l’ont mené devant le tribunal se sont déroulés en décembre 2019 et début janvier 2020. Le 3 décembre, Tania est à la maison et s’occupe des tâches ménagères. Elle termine par la vaisselle quand, à midi, Eugène revient du boulot. Il s’installe, mange et ayant fini, il se lève de table et laisse tout en plan. Tania lui fait remarquer qu’il pourrait faire un effort pour débarrasser et pourquoi pas laver son assiette. Réflexion qui le met hors de lui. « Je bosse, je ramène de l’argent, tu ne fous rien, c’est à toi de faire la vaisselle. » S’ensuivent des insultes, le couple est coutumier du fait, et des coups. Il l’attrape par les cheveux, la frappe à coup de poings, elle s’empare d’un couteau et le pique un peu pour lui faire lâcher prise. Ce qu’il fait, et elle en profite pour se barricader dans la chambre. Eugène repart au travail. À 16 heures quand il revient, il s’empare de la vaisselle qu’elle n’avait pas touchée et la réduit en miettes. Puis arrache les rideaux de la maison. Tania s’enfuit alors chez sa grand-mère pour y passer la nuit. Réveillée par une pluie de coups de poings Le lendemain matin, elle est réveillée par une pluie de coups qui s’abat sur elle. C’est Eugène qui a la rancœur tenace. Leur fils âgé de huit ans tente de s’interposer, mais Eugène n’en a cure et l’envoie au sol. Puis il regagne tranquillement son véhicule et s’en va, tandis que Tania bombarde sa voiture avec tout ce qui lui tombe sous la main. Un mois se passe sans incident particulier si ce n’est les insultes habituelles d’Eugène envers Tania du genre, « Tu gaspilles mes sous, (…) t’as qu’a aller faire la p…. pour gagner de l’argent.» Le calme avant la tempête. Le 4 janvier, la police municipale de Papeete est appelée pour une dispute au sein d’un couple. Arrivés sur les lieux, les muto’i trouvent un homme avec une plaie à la cuisse qui saigne abondamment. C’est Eugène. Dans la matinée, Tania était passée le voir à son travail pour qu’à la pause déjeuner, ils rentrent ensemble en voiture. Énervé parce qu’elle vient le voir à son boulot, Eugène lui répond qu’il n’a pas le temps et qu’il risque de finir tard. Tania patiente donc un peu plus loin, mais l’aperçoit conter fleurette à l’une de ses collègues. Il lui cogne la tête à plusieurs reprises sur le tableau de bord Le retour en voiture donne lieu à une nouvelle scène. Alors que Tania lui fait remarquer son attitude avec sa collègue, Eugène s’emporte. Il la saisit par les cheveux et lui cogne la tête à plusieurs reprises sur le tableau de bord de la voiture. Arrivé au domicile, Tania sort de la voiture et file dans la cuisine. Eugène la rattrape et continue à la rosser en lui frappant la tête contre l’évier. Elle prend alors un couteau et tente de se dégager. Eugène empoigne le couteau, et se faisant se blesse à la main. Il s’en va s’asseoir sur les marches de l’escalier et continue à l’injurier à distance. Elle voit rouge, s’empare d’un autre couteau, se précipite sur lui et le frappe à la cuisse. « Accidentellement, dira-t-elle dans son audition à la police, je voulais le planter à côté de lui, mais il a bougé sa cuisse. » Eugène, ne se rappelant plus trop des faits, se borne à dire aux mutoi, « Ça s’est passé comme elle l’a dit. » La légitime défense en question Pour la procureure, « il n’y en a pas un pour racheter l’autre. C’est un couple de brutes. Le caractère habituel des violences est bien établi. » De fait, des témoins ont déposé, indiquant que Tania avait souvent des marques de coups sur le corps et sa sœur a précisé qu’il « manquait des cheveux sur le haut du crâne » de sa sœur, arrachés par Eugène lors d’empoignades. Quant à la légitime défense, pour la procureure, celle-ci est mise à mal. « Elle a surréagi aux insultes de monsieur. » Elle réclame une peine de 12 mois de prison avec sursis pour chacun. L’avocate de Tania ne partage pas ce point de vue. Pour elle, la question de la légitime défense doit se poser. « Même si sa riposte n’est pas immédiate, il lui a tout de même frappé la tête contre l’évier. On est dans une scène particulièrement violente. De plus il continuait à l’insulter et en général avec lui, après les insultes, les coups arrivent. » Pour elle, « sa défense est proportionnée par rapport aux risques qu’elle encourrait. » Elle plaide sa relaxe. Après en avoir délibéré, le juge a condamné Eugène à 12 mois de prison avec sursis, assortis d’une interdiction d’entrer en contact avec Tania qui, elle, a été condamnée à 8 mois avec sursis. À noter que depuis ces évènements, le couple a entamé une procédure de divorce. Mieux vaut tard que jamais. Cliquez pour partager sur Facebook(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur Twitter(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur LinkedIn(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquer pour imprimer(ouvre dans une nouvelle fenêtre)