Ce jeudi au tribunal, un papi de 56 ans était convoqué pour comparaître à la suite d’une bagarre familiale, dont le point de départ est un paquet de chips. Il a été condamné à trois mois de prison avec sursis.
Papi a 56 ans et n’aime pas les cris. Quand ça hurle, il perd ses moyens et la seule réponse qu’il a, ce sont les coups. Restes d’une enfance marquée par la violence. Les faits qui l’ont mené à la barre sont relativement simples et remontent à 2018. Des violences sur sa petite fille et sur sa fille, à cause d’un paquet de chips…
Papi, dans sa cuisine, a un petit creux. Il prend un paquet de chips et en propose à sa petite fille de 15 ans qui visiblement fait la tête, ce qui l’énerve passablement dans un premier temps. Il ouvre le paquet et la jeune fille plonge sa main dedans pour se servir. Ce qui finit de l’énerver. Il repousse du dos de la main l’adolescente, à hauteur du visage, qui alors le frappe au bras. Il la repousse une deuxième fois et elle se met à pleurer.
Entendant les pleurs de sa fille, sa mère arrive en trombe et s’en prend alors à son père qui lui explique ce qu’il s’est passé. Elle ne le croit pas car la jeune fille maintient mordicus que son grand-père l’a frappée.
La discussion s’envenime et papi perd ses mots. Il assène un coup de tête à sa fille qui réplique par un coup de poing. Sur ces entrefaites, son mari déboule et frappe papi qui tombe à terre. Celui-ci se relève prend un couteau et menace sa fille de la tuer. Ce qu’il ne fera pas.
« Faire peur, ce sont déjà des violences, monsieur »
À la barre, papi, de petite taille mais affûté, semble se demander ce qu’il fait là. Il est un peu perdu, d’autant qu’il ne maîtrise pas le français. Un traducteur prend place à ses côtés.
« Pourquoi avez-vous pris un couteau ? » lui demande le juge « Je ne sais pas ». « Vous avez dit quoi à votre fille quand vous aviez le couteau à la main ? » « Je ne sais plus ». La seule chose dont il se souvient c’est d’avoir fait peur à sa petite fille. « Faire peur, ce sont déjà des violences, monsieur » l’informe le juge. « Vous en pensez quoi de tout cela ? » « Je n’ai pas grand-chose à dire, c’est juste, ce que vous me reprochez ».
Sa fille se présente alors à la barre pour demander un franc de dommages-intérêts. Devant l’incompréhension du juge, elle explique : « c’est un papi d’amour pour moi, et je ne veux pas porter plainte ». « Mais il vous a tout de même donné un coup de tête ! » « Oui. » « Et vous aviez dû avoir peur quand il a pris le couteau. Vous avez cru mourir ? » « Oui, mais il n’a rien fait. »
Pour la partie civile qui défend les intérêts de la jeune fille, « à l’époque la jeune fille avait 15 ans, et à cet âge-là, on ne pleure pas pour un rien. Aujourd’hui, tout le monde dit qu’il ne s’est rien passé et qu’elle a fait des manières (…) Il y a eu des violences physiques et verbales et elles sont établies. » Elle réclame 50 000 Fcfp de dommages-intérêts.
« Le climat qui règne dans cette famille est empreint de violences. »
Au tour de la procureure de prendre la parole. « Le climat qui règne dans cette famille est empreint de violences. Il fait peur à sa petite fille, il donne un coup de tête à sa fille qui répond par un coup de poing. On voit qu’il n’y a plus de respect mutuel, et après il s’empare d’un couteau ». Relevant que pour eux, « cela semble banal, la violence est ancrée dans leur quotidien ». Suite à ce constat, elle demande une peine de quatre mois de prison avec sursis, « afin qu’il garde en tête qu’il doit se contrôler ». Une peine relativement clémente car l’accusé n’a pas de casier judiciaire.
Toutefois, pas assez clémente, selon la défense qui estime qu’à aucun moment l’accusé n’a nié les scènes de violences, expliquant que pour lui, « la violence ce sont les coups. Pas les insultes ou les cris. Maintenant, il a compris et il a pris la mesure de son attitude. » Elle demande au juge de le condamner à un travail d’intérêt général.
Le juge le condamne à trois mois de prison avec sursis, lui expliquant que « les trois mois de prison, vous ne les ferez pas, sauf si pendant une période de 5 ans à compter de ce jour, vous commettez une infraction. » L’accusé acquiesce et lâche, « j’aimerais demander pardon pour cette faute ».