Sur les 2 000 membres du personnel du CHPF, plus de 800 ont été vaccinés ces deux derniers mois, dont la majorité des médecins de l’hôpital. Si les réticences existent chez certains agents, ce sont surtout les nombreuses contaminations de soignants pendant l’épidémie qui ralentissent la marche.
« L’urgence, c’est de vacciner les personnes vulnérables et le personnel de santé qui est en première ligne de l’épidémie ». C’était le 7 janvier, les premières doses de vaccins livrées par l’État arrivaient sur le tarmac de Faa’a et les représentants du Pays voulaient être clairs: priorité aux plus âgés, mais aussi aux soignants, ceux du CHPF en particulier. Raison pour laquelle un « dispensaire de vaccination », fonctionnant comme partout sur la base du volontariat, a ouvert ses portes dès le 15 janvier au sein de l’établissement. Deux mois plus tard le Dr Sicard se dit plutôt satisfait du résultat. « Pendant l’épidémie de Covid, on a eu plusieurs centaines de contaminés parmi le personnel, et ce qu’on craignait le plus c’était de ne plus pouvoir répondre à la demande en offre de soins, rappelle le médecin du travail du centre hospitalier. Le but de la vaccination c’était donc de préserver les capacités de prise en charge de l’hôpital ». Avec environ 800 personnes vaccinées sur les 2 000 agents (soignants et non-soignants), cette protection du personnel a « bien avancé » juge-t-il.
Deux tiers des médecins déjà volontaires
60% du personnel du CHPF ne s’est pourtant pas encore porté volontaire. Bien plus que les 23% des hôpitaux périphériques de Nuku Hiva et Raiatea, eux aussi éligibles à la vaccination dès les débuts de la crise. Les soignants du Taaone seraient-il plus réticents à l’injection ? Non, répond le Dr Sicard. Comme dans le reste de la population, « tout le monde n’est pas volontaire, il y a des réticences chez certains ». Mais le corps médical montrerait l’exemple avec « 60 à 70% » des médecins de l’hôpital déjà vaccinés, « alors qu’on n’observe généralement pas le même engouement lors des vaccinations contre la grippe, par exemple ». D’après le responsable, beaucoup de soignants contaminés entre septembre et janvier doivent tout simplement attendre avant de pouvoir se porter volontaire. S’il n’est pas dangereux de se faire vacciner après une contamination, les autorités recommandent en effet d’attendre 3 à 6 mois, période minimum pendant laquelle la protection immunitaire fonctionne déjà naturellement.
La vaccination simple « facilite l’acceptation »
Le CHPF n’observe donc « pas du tout la même réticence que l’on peut percevoir en métropole ». Le gouvernement central s’était étonné, début mars, que seul un tiers des soignants avaient déjà franchi le pas à l’échelle nationale. Mais pour le Dr Sicard, deux éléments jouent en faveur de la campagne en Polynésie : « d’abord on a le vaccin Pfizer qui a semble-t-il une meilleure acceptabilité », explique-t-il. Au niveau national, c’est surtout le sérum AstraZeneca, critiqué pour ses effets secondaires et dont l’autorisation de mise sur le marché vient d’être temporairement suspendue, qui a été proposé aux soignants. « L’autre chose, c’est qu’il suffit de venir au dispensaire de vaccination et que ça prend 10 minutes sans rendez-vous », quand les soignants métropolitains doivent souvent prendre rendez-vous plusieurs semaines à l’avance, vu les disponibilités en vaccins très fluctuantes. « L’acte de vaccination est simple et ça facilite peut-être l’acceptation », reprend le Dr Sicard.
Le CHPF continue sa campagne à raison d’une vingtaine d’injections par jour et connait aujourd’hui « beaucoup moins de cas de Covid », sans qu’il soit possible de mesurer séparément l’impact de la vaccination et la baisse de l’épidémie dans le pays. « On peut quoiqu’il arrive se dire que la campagne est déjà bien entamée et déjà bien réussie, complète le médecin du travail. Bien sûr, on peut espérer que tout le monde se vaccine, mais si on arrive à 60% du personnel, on aura atteint un bon niveau de protection. D’autant plus que les études de séroprévalence fait par ailleurs montre que beaucoup plus de gens qu’on pensait ont été en contact du virus ». L’étude de séroprévalence menée au niveau du pays doit d’ailleurs rendre ses résultats cette semaine. Elle devrait permettre de chiffrer plus précisément les objectifs de vaccination à l’échelle de la population polynésienne.