Avec plus de 6 800 injections réalisées en une semaine, la cadence de la campagne de vaccination continue de grimper. Mais les centres peinent à suivre cette accélération décidée par la présidence, et annoncée sans guère de préparation. Résultat : des volontaires qui doivent faire demi-tour et des stocks de vaccins plus que jamais sous tension.
3 000 doses entre vendredi et lundi, entre 840 et 970 par jour depuis. En une semaine, et à la faveur du « vaccinodrome » mis en place à la présidence le weekend passé, la cadence de la campagne de vaccination a presque doublé. Un succès dont s’est félicité Édouard Fritch devant l’assemblée mardi, mais qui cache des difficultés importantes sur le terrain. Car la semaine dernière, le président a aussi déclaré « ouverte à tous » la vaccination, jusque là soigneusement organisée par phases et ordres de priorité d’âge et de profession. « La présidence a jugé que cette organisation ne permettait pas une cadence optimale », explique-t-on poliment à la Direction de la santé. En aparté, beaucoup de professionnels impliqués dans cette campagne ont été surpris, voire franchement agacés par ces annonces qui n’ont pas pas pu être « convenablement préparées » sur le terrain. D’où le « petit couac » de communication sur la fin de l’obligation de rendez-vous . D’où, aussi, une confusion et des tensions à l’entrée de certains centres de vaccination depuis le début de la semaine.
« Revenez au mois de mai »
Il faut dire que ces derniers jours, des centaines de volontaires à la vaccination se sont présentés sans rendez-vous, comme c’est désormais la règle, dans un des huit centres de Tahiti et Moorea pour recevoir une première injection. Un empressement lié, pour certains, à la perspective d’une obligation vaccinale pour voyager, là encore mise sur la table par Édouard Fritch alors même que le débat sur la faisabilité juridique n’en est qu’à ses débuts. Sauf que beaucoup de ces volontaires à la vaccination ont dû faire demi-tour. Et on reçu des discours très variables suivant les centres.
À Pirae, ce matin, l’accueil estimait qu’aucune vaccination non programmée ne pourrait être effectuée « avant le 26 avril » quand le centre de Faa’a pariait sur la semaine prochaine. Le kiosque-infos santé de Paofai lui expliquait que seulement 5 personnes par jour pourraient être acceptées sans rendez-vous et invitait les autres à revenir « début mai » s’ils voulaient être sûrs de ne pas faire la queue. Une situation qui s’explique en partie par les rendez-vous déjà programmés avant l’annonce présidentielle et que les centres sont tenus d’honorer. Les délais avancés dans certains cas pourraient résulter d’une « erreur dans le calendrier » – la plateforme Covid doit faire le point sur le sujet d’ici la fin de semaine. Mais une chose est sûre : la situation est difficilement compréhensible pour les volontaires éconduits, et ces embouteillages dans les centres ne jouent pas en faveur de la campagne de vaccination.
Le vaccinodrome de Malardé devra attendre
« La plupart du temps, on explique les choses calmement et les gens comprennent très bien », assure le porte-parole de la plateforme Covid Manutea Gay, qui parle d’un « tuilage en cours », entre deux temps de la campagne. Le responsable assure que l’organisation va se lisser dans les jours à venir, et tient à rassurer : « les personnes qui reçoivent leur première dose pourront faire leur rappel en temps et en heure », soit 21 jours après la première injection. Une précision importante vu la tension sur les stocks de vaccin qu’impose cette soudaine montée en cadence. Ce jeudi, 21 774 doses avaient déjà été utilisées et 9 500 autres sont censées être « mise de côté » pour des rappels. Si le Pays et le Haussariat ne brillent pas, ces dernières semaines, par leur transparence sur les réserves de vaccins, Dominique Sorain avait chiffré à 26 910 le nombre de doses déjà livrées jeudi dernier. Un arrivage d’environ 2 600 doses est venu compléter ce total le weekend dernier et une nouvelle livraison, comparable, est attendue pour cette fin de semaine. Ce n’est qu’entre fin mars et début avril qu’est programmée une montée en charge de ces livraisons, à environ 4 500 doses hebdomadaires.
Si la plateforme Covid assure que les dotations de l’État sont « en cours de réevaluation » ces chiffres indiquent que les stocks sont d’ores et déjà gérés à flux tendus. « Nous organisons les plannings de vaccination en fonction des stocks et il n’y a pas de raison pour l’instant de fermer des centres », rassure Manutea Gay. En revanche impossible d’ouvrir un nouveau centre éphémère à l’Institut Malardé, ce weekend. C’est pourtant ce qu’avait annoncé Édouard Fritch la semaine dernière. Quand la volonté politique se heurte à la réalité du terrain.