Après près d’une décennie de projets et de communication politique, le complexe touristique de Punaauia a connu un nouveau revers. La dernière procédure en date d’attribution de lots a été déclarée infructueuse, a appris Tahiti Infos. René Temeharo, ministre de l’Équipement en charge des grands projets, assure pourtant que Village Tahitien peut rebondir rapidement.
Près de 10 ans déjà que le projet de ce complexe touristique de Punaauia est dans les tuyaux du Pays. Au fil du temps, des projets en provenance des États-Unis, de Chine ou d’Abu Dhabi avaient été choisis ou promus par certains élus, pour développer ce qui devait s’appeler le Mahana Beach – 3 000 clés annoncées – et qui s’est mué en un « plus raisonnable », mais toujours très ambitieux Village Tahitien en 2017. Six hôtels et résidences hôtelières prévues, 1 300 clés au total de la pointe Tata’a au parc Vairai, et déjà des turbulences : mi-2019, les investisseurs maori qui avaient été retenus par le Pays se désistent, faute de financement, et la procédure est relancée dans la foulée. L’appel à manifestation d’intérêt, plus cadré et plus orienté vers les investisseurs locaux, devait enfin permettre de concrétiser. Cinq groupes d’investisseurs locaux s’étaient d’ailleurs fait connaître, et le choix des lauréats était un temps annoncé pour le mois de juin 2020. Mais comme l’a révélé Tahiti Infos, la procédure a été déclarée infructueuse le 5 juillet, dans la plus grande discrétion.
Changer le statut du foncier
La faute à la pandémie ? La crise sanitaire n’a pas aidé les porteurs de projets à s’engager, mais c’est aussi le montage proposé par le Pays qui semble coincer. « Sur les trois investisseurs qui ont été retenus jusqu’au bout, deux se sont désistés en émettant le vœu de revoir le schéma foncier, et le troisième n’était pas dans le cadre fixé par le projet, explique aujourd’hui René Temeharo, ministre de l’Équipement et des grands projets, qui est désormais en charge du dossier. Il nous faut prendre le temps de revoir la structure juridique pour que ce projet touristique se réalise ». Les six lots d’hébergement, tous assis sur du domaine public du pays étaient proposés sous forme de baux administratifs, accordés pour 35 ans renouvelable une fois. Un régime juridique trop rigide – impossibilité de signer des baux commerciaux pour installer un magasin dans un hôtel, contreseing obligatoire du Pays pour certaines décisions du bénéficiaire, absence d’indemnité de sortie lors de la fin du bail… – pour être attrayant pour les porteurs de projets. La loi interdisant un changement de règles en cours de route, il a fallu « mener la procédure à son terme »… Pour la relancer une fois le foncier transformé en domaine privé, assure le ministre.
Nous allons essayer de faire au plus tôt
Il s’agit donc de « développer une autre vision » du projet « sans abandonner le travail qui a été mené ces dernières années », assure René Temeharo. Pourtant le Pays envisage aujourd’hui deux options. « Soit on repart sur des petits lots avec des déclassements » du foncier, explique le ministre. La définition des lots pourrait alors être modifiée à la marge, en fonction des dernières études techniques effectuées sur le site et le retour des candidats de ces derniers mois. L’avenir du lot numéro 6, le seul lot d’hébergement sur lequel aucune offre n’a été reçue, pourrait aussi être revu, le Pays ayant déjà évoqué un projet de clinique privée sur ce terrain dominant le futur Village Tahitien. « Soit on peut se dire : regroupez-vous au sein d’une unité d’aménageurs, qui va concentrer les besoins des uns et des autres pour faire aboutir ce projet », reprend le ministre. Un changement de logique complet, dans lequel le Pays laisserait la main à un acteur public-privé pour développer le site de Punaauia. Les analyses juridiques sont en cours, et la décision, purement politique, devraient être prise d’ici un mois. « Nous allons essayer de faire au plus tôt, parce que nos investisseurs demandent aussi à ce qu’on active, pointe le ministre. Il faut faire vite, mais avec prudence. Nous allons faire de notre mieux ».
Le Pays, en tout cas, l’assure : les investisseurs locaux qui s’étaient faits connaître lors de la dernière procédure, sont toujours sur les rangs. « Ils veulent toujours se repositionner », assure René Temeharo, qui espère même voir d’autres porteurs de projets, pourquoi pas internationaux, pour faire aboutir le Village Tahitien « le plus tôt possible ». Un optimisme passé d’élu en élu depuis près d’une décennie.